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L’ENTREPRISE BOUSSOLE

L’ENTREPRISE BOUSSOLE

« Une crise ? Non, le naufrage progressif d’un monde », voilà comment s’ouvrait le récent Trend Obs 2017 réalisé par l’institut Ipsos. Cette étude sur les grandes tendances sociétales venait nous livrer le portrait assez sombre d’un monde à la dérive, et d’une humanité sans repère qui se laisse guider par ses peurs.

Et pourtant… Aussi justes soient toutes les analyses existantes, le fatalisme ambiant ne peut que dérouter. Car si, dans les mutations sociales, politiques et économiques qui s’opèrent, beaucoup d’observateurs et d’acteurs identifient avant tout des menaces et des risques, il existe autant de recompositions et d’opportunités de changer les choses et de s’engager pour cela. Et parmi les acteurs de premier rang, entreprises et entrepreneurs constituent, parmi d’autres, un repère.

« Le pessimisme est d’humeur, l’optimisme est de volonté » (Alain)

Connectés en permanence à de multiples flux d’informations, plus rien ne nous échappe. Alertes et notifications font clignoter nos écrans, nous exposent en temps réel au monde et à ses vibrations et soubresauts, le plus généralement négativement. Ce monde est désormais au bout de nos doigts, avec son lot de misères, de guerres, de catastrophes naturelles… Une fenêtre pour mieux connaître et comprendre ce et ceux qui nous entourent. Mais aussi un extraordinaire effet de loupe sur les dimensions les plus obscures et les moins réjouissantes de notre quotidien national ou planétaire, les périodes électives ne nous épargnant au passage aucune outrance dialectique.

Quelques observateurs plus optimistes viennent utilement nous titiller et nous rappeler que, sur bien des aspects, le monde ne s’est jamais bien aussi porté : baisse tendancielle de la sous-nutrition, de la mortalité infantile, des homicides, et, dans cette période pourtant chargée, même le nombre de victimes d’attentats serait moins important que dans les années 70 et 80. Qui le croirait ? Dans son dernier livre « Le monde va beaucoup mieux que ce que vous ne croyez », Jacques Lecomte mentionne ainsi le recul de l’extrême pauvreté, divisée par deux en 20 ans. Nicolas Bouzou, économiste, essayiste et chroniqueur, évoque de son côté à longueurs de tribunes ces faits et chiffres de progrès que l’on ne veut pas voir, raillant au passage les nostalgiques et déclinistes de tous bords et autres apologistes des désastres à venir.

Nous devons donc prendre conscience aujourd’hui, et nos médias au premier chef, que là où la peur paralyse, l’espoir mobilise. Et nous, producteurs, relais et consommateurs d’informations, devons mettre un point d’honneur à connaître nos limites et nous préserver du catastrophisme populiste. Se préserver, ne signifie pas s’échapper à tout prix, s’exiler dans un lieu off-grid, et se replier sur soi-même. Se préserver, c’est savoir sans avoir le sentiment de subir, prendre de la hauteur pour remettre en perspective les informations, dans toute leur complexité. Au final, c’est retrouver un nécessaire sens de la nuance. Cela demande un certain effort et un certain courage.

Sens, appartenance, engagement, les trois valeurs ajoutées de l’entreprise

Dans ce monde en transition, où de nouvelles fractures émergent et d’anciens points de repères se diluent pour définir de nouveaux équilibres géopolitiques, économiques, sociaux, culturels, les entreprises et les entrepreneurs ont une responsabilité à exercer. Les enquêtes d’opinion montrent d’ailleurs à l’envi à quel point les attentes des citoyens à leur endroit, pour ne pas dire leurs exigences, ne sont pas minces.

Parce qu’entreprendre est fondamentalement une vision du monde optimiste et opportuniste, les entreprises contribuent à leur échelle à améliorer la perception du monde qui nous entoure. Parce qu’en produisant et proposant du lien social, du projet d’avenir et du défi individuel et collectif, nous, entrepreneurs, mobilisons nos parties prenantes autour d’un engagement sociétal bien éloigné de l’égoïsme économique ou de la confiscation sociale dont on nous affuble trop souvent. Il suffit à cet égard de jeter un œil amusé sur les représentations très caricaturales des entreprises et des entrepreneurs dans la production cinématographique, notamment française, de ces dernières années.

Face à cette attente exigeante, que nous le voulions ou non, nous sommes donc attendus au tournant, et les entreprises et leurs dirigeants auront de moins en moins le choix que de s’engager et prendre position sur l’actualité et l’avenir de notre monde. Définir l’engagement de son entreprise ne signifie pas endosser forcément un rôle d’agitateur ou de sauveur. Un « petit » combat, s’il est juste, nourri au quotidien par les acteurs et les actions de l’entreprise, cohérent avec eux, est aussi noble qu’une « grande » cause.

Parce qu’elle produit du sens, de l’appartenance et de l’engagement, l’entreprise apporte sa pierre aux identités individuelles et collectives, c’est en cela qu’elle sera demain plus que jamais un animal politique, et nous serions tentés d’ajouter, au sens noble du terme.

« L’homme est capable de faire ce qu’il est incapable d’imaginer » (René Char)